Redevance kilométrique pour les poids lourds - Evaluation et modification du réseau soumis au péage

Ce jeudi 23 février, sur proposition du Ministre Maxime PREVOT, le Gouvernement wallon a décidé d’adapter le réseau routier soumis au péage pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes après avoir mené une rigoureuse évaluation.

I.            Rappel

En 2011, les Gouvernements wallon, bruxellois et flamand ont décidé de mettre en œuvre un péage kilométrique pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes en Belgique. Après diverses étapes administratives, le péage a été rendu effectif le 1er avril 2016.

L’objectif consiste à assurer une équité de traitement dans la participation au financement du réseau routier en percevant des recettes en fonction de l’utilisation effective du réseau et pas uniquement en fonction du lieu d’immatriculation vu que 88% des véhicules circulant sur nos voiries sont immatriculés en dehors de la Wallonie, dont 44% en dehors du pays.

Contrairement à la Flandre et à Bruxelles où le péage se traduit par une taxe versée aux recettes générales, la Wallonie a choisi d’en faire une redevance dont les recettes, par définition, sont entièrement affectées à la SOFICO pour le  réseau (auto)routier. C’est ainsi qu’environ 240 millions € par an, permettent notamment la mise en œuvre du Plan Infrastructures 2016-2019.
 

II.          Modification du réseau soumis à péage

Le réseau concerné par le péage kilométrique pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes en Wallonie a été défini le 11 juin 2015 par le Gouvernement wallon, ce qui correspond à 2.250 km de voiries comprenant le réseau sur lequel était perçue l’Eurovignette, complété par 300 km de routes régionales déterminées pour éviter les reports de trafic sur des routes régionales et y préserver ainsi la mobilité et la sécurité des riverains1. Le Gouvernement wallon s'était également engagé à effectuer une surveillance du réseau afin d'évaluer les éventuels autres reports de trafic significatifs non souhaités sur des sections de route hors prélèvement. 

Ce jeudi 23 février 2017, le Ministre Maxime PREVOT, a présenté cette évaluation au Gouvernement wallon.
 

a)   Demandes de révision contradictoires 

Quelques semaines après la mise en place du péage, plusieurs Bourgmestres et riverains ont adressé des plaintes liées à des suspicions de trafic supplémentaire de camions sur certaines routes et ont demandé l'extension du réseau soumis à la redevance.

Les fédérations de transporteurs et les entreprises se sont également manifestées mais, a contrario, pour réduire le réseau soumis à péage.

Il a donc fallu objectiver les requêtes et établir un équilibre entre d'une part, la protection et l'assurance de la sécurité routière ainsi que la tranquillité des riverains et d'autre part, le fait de ne pas porter atteinte à l'économie locale.
 

b)   Méthodologie d'évaluation

L'évaluation s’est basée sur une source de données existantes et continues avant et après l'introduction du péage kilométrique des poids lourds pour étudier des données comparables, soit entre le 1er décembre 2015 et le 1er décembre 2016.

Après analyse des possibilités, le choix s'est porté sur l'étude des déplacements des cartes SIM présentes dans les tachygraphes électroniques des camions. Un marché public a été passé en ce sens avec l'opérateur de téléphonie mobile Orange SA pour les données de bases et la SPRL Cropland pour leur traitement.

Les cartes SIM des tachygraphes n’étant pas identifiables en tant que tel, l'opérateur téléphonique a donc dû identifier les déplacements des camions parmi les autres véhicules, les données des GSM personnels de tout un chacun, les terminaux de paiement portables, … Le traitement des données a par conséquent nécessité le développement et le calibrage d’outils spécifiques avec des algorithmes très puissants. Au total, pour les zones examinées et les 365 jours de la période d'étude, ce sont plus de 1.000 milliards de données qui ont été analysées.
 

c)   Constats

Le trafic des poids lourds évolue au cours de l'année selon les saisons et il est rythmé selon les fêtes, les jours fériés et les vacances. Le trafic des camions varie donc fortement d'un jour à l'autre et d'une période à l'autre. A titre indicatif, le trafic des camions est 5 fois plus faible le samedi qu'un jour de semaine et même 10 fois moindre le dimanche ou un jour férié. Les activités saisonnières de certaines entreprises ou certains secteurs d'activités (agriculture, …) font également varier le trafic de camions sur certaines routes ou parties du territoire.

On constate donc que l'introduction du péage kilométrique n'est qu'un élément parmi de nombreux autres faisant varier significativement le trafic de camions en un lieu.

Une autre source de données, les déplacements anonymisés provenant des OBU (On Board Unit – équipement obligatoire pour la facturation du péage kilométrique), permet d’apprendre qu’un peu moins de 20 % du trafic total de camions circulent sur ce réseau non payant de notre territoire, en comparaison à une estimation de 25% faite préalablement à l’introduction du péage. Le trafic réel des camions sur le réseau non payant est donc moindre qu'initialement estimé.

Globalement, on ne peut donc pas constater un report massif de trafic de poids lourds du réseau soumis à péage vers les voiries secondaires ou non payantes.

Comme cela apparait dans la liste des vingt sites étudiés (en annexe), des augmentations sur des routes déjà payantes ont été constatées (exemple : la N83 reliant Arlon à Bouillon), des diminutions (exemple : la N529 à hauteur de Frasnes-les-Anvaing, ou encore des statu quo (exemple : la N53 à Beaumont). L'introduction du péage kilométrique apparaît donc comme un élément moins important que d'autres facteurs faisant varier le trafic de camions.

Après l’analyse de l'ensemble des données, le Gouvernement wallon a donc décidé d'adapter le réseau wallon soumis au péage kilométrique des camions en ajoutant uniquement les deux sites où la redevance peut réellement avoir eu un impact sur le report du trafic :

  • la section de la N243 (Chaumont-Gistoux) entre la N25 et la N29, ce qui représente 13 km ;
  • la section de la N29 entre l’E411 (Perwez) et la Flandre au nord de Jodoigne, ce qui représente 20 km.

Au total, sur ces 33 km de routes, une augmentation du trafic de poids lourds de l'ordre de 1 à 3,5 % a été constatée représentant une proportion plus élevée du trafic de transit. Cette adaptation sera effective pour juillet 2017 vu les adaptions techniques et administratives nécessaires.

III.       Poursuite de l’évaluation

Par ailleurs, le Gouvernement wallon a décidé de poursuivre l’évaluation du réseau en continu en vue d'adapter, si nécessaire, le réseau selon les éventuelles évolutions sur le terrain.

Cela sera notamment le cas pour trois zones particulièrement sensibles : Pepinster et Theux, l'agglomération de Liège et la zone entre Lessines, Enghien et Soignies. Actuellement, élargir le réseau, dans ces cas précis, pourrait s'avérer être « une fausse bonne idée ».
 

a)   Pepinster et Theux

Une concertation sera menée avec les autorités locales afin d'effectuer un suivi et une analyse plus approfondie de la situation.

Sur une année, une augmentation moyenne du trafic de poids lourds de 5,5 % a été enregistrée sur les nationales N62 Theux-Louveigné et N666 Pepinster – Louveigné. Or, cet accroissement du trafic est à comparer à une augmentation générale sur l’ensemble de la région puisque même sur les portions d’autoroutes avoisinantes, la E25 et la E42, le trafic de camions a progressé de plus de 15 %. L'introduction du péage kilométrique ne constitue donc pas un facteur d’accroissement du trafic selon l’analyse des données. L'élargissement du réseau soumis à péage pourrait créer un « appel d'air » ou conduire à reporter du trafic sur des voiries encore moins adaptées à la circulation de poids lourds et affecter la vie économique locale.

Une collaboration avec les services de Police visera également à réaliser davantage de contrôles dans les environs et notamment à faire respecter l'interdiction de circulation des poids lourds de plus de 10 tonnes au centre de Theux.

Pour rappel, le Conseil communal de Theux a même décidé, il y a quinze jours, de rejeter une motion demandant d'intégrer la route entre Laboru et le centre Theux au réseau soumis à péage en raison de données contradictoires au ressenti local et afin de ne pas pénaliser l’économie locale.
 

b)   Agglomération de Liège

Comme pour Pepinster et Theux, le trafic de poids lourds sur les quais de la dérivation n'a pas évolué puisqu’il est estimé à -0.1 %. Toutefois, les autorités locales et les services de Police seront également concertés pour d’une part réaliser davantage de contrôles vu l'interdiction d'accès aux camions de plus de 7,5 tonnes à l'exception de la circulation locale et d’autre part pour envisager des mesures complémentaires. 
 

c)   La zone entre Lessines, Enghien et Soignies

Suite à des restrictions de circulation de poids lourds de plus de 15 tonnes sur la N57 Ghislenghien – Soignies nécessaires face aux dégradations de la chaussée et aux travaux en cours, le trafic a été dévié et a donc perturbé la circulation aux alentours. Cette redistribution du trafic local n'est par conséquent aucunement liée au péage kilométrique.

Par ailleurs, le trafic des camions est tout-à-fait particulier dans cette zone vu la présence de plusieurs carrières dans les environs immédiats. Leurs produits bruts ayant une faible valeur marchande, l'impact du péage kilométrique serait par conséquent très élevé en rapport à la marchandise transportée.

Vu l'origine de la redistribution de la circulation des camions, la nature du trafic et l'impact sur une activité locale, il a donc été décidé qu’il n'est pas opportun d'y étendre localement le réseau soumis à péage. Cette situation particulière sera cependant suivie très attentivement. 

***

Pour le Ministre Maxime PREVOT, les modifications apportées au réseau à péage pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes permettront de renforcer la sécurité routière tout en ne contraignant pas l'activité locale. Le Ministre a également demandé à ses services de continuer à suivre l'évolution dans les vingt zones précitées ainsi que dans tous les autres endroits où de nouvelles plaintes pour variations importantes de trafic le nécessiteraient.

 

 

1 Wallonie : 27 % du réseau (auto)routier régional est soumis au péage (2250 km / 8 450 km)
Flandre : 32 % du réseau (auto)routier régional est soumis au péage (2224 km / 6 923 km)
Bruxelles : 100 % du réseau (auto)routier régional est soumis au péage 

 

Contact Presse :
Audrey JACQUIEZ – Porte-parole du Ministre Maxime PREVOT – 0497/161.861

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